Claude Gellée

DIT LE LORRAIN


D’origine paysanne, Claude Gellée est né à Chamagne, petit village de la vallée de la Moselle, à « une lieu et demi » au nord de Charmes. On peut encore visiter sa maison natale, devenue depuis 1982, tricentenaire de la mort du peintre, un centre de manifestations culturelles variées organisées par I’association des amis de Claude Gellée.

Orphelin à 12 ans, démuni et probablement illettré, il rejoint I’atelier de son frère, graveur sur bois, à Fribourg-en-Brisgau. En 1618, il se rend en Italie et entre comme valet, puis élève et enfin assistant dans l’atelier du peintre paysagiste Agostino Tassi : il y acquiert des connaissances techniques et découvre l’antiquité profane (gréco-romaine) et sacrée (biblique et chrétienne).

En 1625, il revient à Nancy et travaille dans I’atelier du peintre Claude Deruet pour les ducs de Lorraine jusqu’en 1627. II quitte alors Ia Lorraine, qui va connaitre les ravages de la guerre de Trente Ans (Claude GELLEE est un contemporain de Jacques Callot) pour s’installer définitivement à Rome où il ne cessera de peindre jusqu’à sa mort en 1682.

Sa production picturale est considérable. Claude Gellée a peint pour les plus grands personnages de son temps le Pape Urbain VIII, le roi d’Espagne, Ies Cardinaux de la Curie Romaine, des ambassadeurs (Philippe de Béthune, Louis de Bourbon). Elle comporte : 250 tableaux répertoriés, 1250 dessins et esquisses (dont le « liber veritatis » qui reproduit près de 200 esquisses de dessins, de 1635 à sa mort), 50 gravures. 

Ces œuvres se trouvent dans leur grande majorité, dans des collections privées anglaises ou américaines. Une vingtaine de tableaux sont restés en France dont « I’embarquement de Sainte-Paule à Ostie conservé à Épinal au Musée départemental des Vosges.

On distingue traditionnellement plusieurs périodes de créations artistiques : jusqu’en 1630, il est « assistant de Maitres plus prestigieux (finition des paysages pastoraux). De 1630 à 1650, il peint les fameux paysages classiques où il recompose une nature idéale à partir d’une observation minutieuse et met en scène des sujets religieux tirés de Ia bible ou mythologique, tirés d’Ovide ou de Virgile, ainsi : Le jugement de Paris 1645, L’embarquement de la Reine de Saba en 1648. L’artiste montre une prédilection très marquée pour Ie genre des marines : « ports de mer au soleil couchant avec des éclairages crépusculaires ».

De 1650 à 1660, il réalise les grandes œuvres de sa période monumentale et héroïque : Le Parnasse, 1652, Moïse et le Veau d’Or, 1654. De 1660 à 1682, la lumière devient le sujet primordial de son œuvre avec une organisation très rigoureuse des compositions (effets de lumière diffuse, lumière matinale claire et froide venant de gauche, lumière crépusculaire et chaude venant de la droite, vibrations de l’air rendues par de subtiles gradations de tons).

La mort le surprend à 82 ans, alors qu’il vient de terminer son dernier tableau « la chasse d’Ascanius ».

 Maitre incontesté du paysage classique avec Nicolas Poussin, Claude Le Lorrain a exercé une influence considérable sur la peinture et Ia culture européennes : en France, avec Horace Vernet (XVIIIe) et Corot (XIXe), en Italie, avec Gozzi, en Hollande, en Angleterre, avec les précurseurs de I’impressionnisme Turner et Constable (XIXe), en Allemagne, où Goethe et Nietzsche font constamment référence Claude Gellée dans leur vision de I’ltalie antique.

Quelque peu méconnu en France, cet artiste vosgien, observateur passionné et sensible de la nature, mérite d’être redécouvert car sa quête opiniâtre de l’absolu permet son œuvre de rivaliser avec celle des plus grands peintres.